poutine au paprikás

mercredi, août 16, 2006

Premier chapitre


La semaine avant notre déménagement a été de plus intenses. Heureusement que nous « n’avions rien à faire », car s’il avait fallu empaqueter tous nos cossins en plus de tout ce que nous avions à faire, nous n’y serions jamais arrivés. Ça faisait longtemps que je m’étais couché aussi fatigué… et aussi découragé devant la longue liste de choses qui restaient à faire. Résultat : je suis parti sans avoir pensé à déposer un chèque, moi qui cours toujours à la banque dès que je reçois un paiement.

L’intensité du déménagement a atteint son paroxysme la veille de notre départ, quand nous avons enfin mis la main sur nos visas, fraîchement arrivés d’Ottawa, et par le fait même, sur nos passeports. Ce jour-là, les affaires étaient tellement pressantes que le cabinet d’avocat chargé de cette périlleuse mission a dû envoyer une stagiaire cueillir lesdits documents à l’ambassade de Hongrie le jour même, en train jusqu’à Ottawa, pour nous les rapporter le soir. Jusqu’à ce matin-là, nous ignorions si les visas seraient délivrés à temps, et nous avions déjà envisagé de mettre en œuvre les plans B et C (vous ne voulez pas savoir). Bref, il était moins une…

Pour ce qui est des déménageurs, que dire? Affreux mais efficaces? Odorants mais diligents? Édentés mais souriants? Anglophones unilingues (ville LaSalle, c’est si loin), mais sympathiques? Bref, un heureux mélange. Pas eux les crosseurs, en tout cas. Après une première évaluation douteuse où l’on nous a dit tour à tour que notre stock était trop lourd, puis trop volumineux, nous nous sommes fait dire par nos déménageurs odoriférants ce jour-là que ce n’était même pas la peine de démonter nos meubles IKEA tellement il y avait de la place dans le conteneur orange! Ruth nous a confié que le logiciel utilisé pour faire l’évaluation est mal fait et en met toujours trop… Nous le savions, et nous avons même pris une photo de moi dans le conteneur alors qu’il ne reste pratiquement plus rien à charger.

Le lendemain matin, le frère de Marc est venu de Québec pour prendre un tas de cochonneries, surtout à Marc. Il s’appelle Carl, le frère, et il mérite une médaille. Moi, je n’aurais jamais demandé à Michel de faire Québec-Montréal aller-retour en une journée pour des affaires qu’on aurait pu mettre dans le conteneur. Mais les frères Pageau sont d’une loyauté à toute épreuve, et Carl a été un ange. Bien hâte de voir sa nouvelle maison à Québec City.

Sommes arrivés à l’aéroport plus de deux heures à l’avance. Marc (« c’est pas assez, on va rater l’avion ») a presque eu raison cette fois-là. Car l’interdiction actuelle d’apporter des liquides/gels/etc. dans les avions cause des retards et des lignes d’attentes considérables. À la fin, heureusement, on nous a tirés de la file parce que l’embarquement de notre vol était annoncé et que nous n’étions qu’à mi-chemin. En fait, ce qui nous a retardés, c’est la demi-heure d’attente au guichet en raison de notre valise excédentaire (165 $ s’il vous plaît).

En effet, puisqu’il nous fallait apporter le nécessaire pour un mois (le temps que nos possessions traversent l’Atlantique), soit des vêtements, des livres, des disques, du matériel électrique, etc., nous avons rempli 5 valises à ras bord. De plus, comme Marc avait entendu dire que les bagages à main étaient interdits, il n’a pas voulu prendre de chance et il a tout mis dans les valises, n’apportant qu’un livre et son portefeuille. Mal lui en prit, voir paragraphe suivant. Donc, nous avons dû attendre une demi-heure supplémentaire au comptoir de la billetterie d’Air Canada pour payer l’amende et puis attendre encore plus d’une demi-heure à la sécurité… Première fois de ma vie que je traverse l’aéroPET sans même m’asseoir.

Pourquoi « mal lui en prit »? Parce que nos valises sont demeurées à Francfort pendant que nous nous envolions à Budapest. Fatigués, énervés et au bord des larmes, nous sommes rentrés à notre hôtel avec pour toute possession mon humble sac à dos sans liquide/gel/etc. Pas de vêtements de rechange, de brosse à dents, de petite crème anti-irritations (souvenirs d’Édimbourg) : rien que notre découragement et une haine féroce de Lufthansa. Cette nuit-là, entre deux sommes, je suis descendu à l’accueil pour y retrouver nos valises qui nous attendaient calmement. C’est peu de choses, le bonheur. Retrouver les seules choses dont on dispose pendant un mois m’a comblé de joie… Je me suis généreusement enduit de crème et j’ai dormi comme un bébé.

Ça, c’était samedi et dimanche. Depuis, Marc a commencé à travailler et nous reprenons un rythme un peu plus calme. Demain, première visite d’appartements avec la madame de l’agence qui insiste pour nous proposer des logements bien au-delà de notre budget. Va falloir mettre les choses au clair. Mais je crois que le prochain chapitre portera sur le fascinant marché public où nous achetons nos provisions : un drôle de mélange d’horreur et de bonheur. Un peu comme nos déménageurs, quoi!