poutine au paprikás

vendredi, avril 18, 2008

Manger, c'est bon!

Telle était la devise de mon ancienne boîte de traduction, feue Verbomoteur. Le rapport? Aucun, il faut prendre l’expression au pied de la lettre : nous aimions manger. C’est aussi la devise de la maison Pageau-Boucher, où qu’elle soit installée.

Les divertissements sont assez rares, à Reading, par un maussade soir de printemps. En général, après le souper, nous regardons la télé. Parfois, Marc travaille et je pitonne. Pas encore d’amis dans le coin, pas vraiment assez chaud pour des promenades agréables (le mercure est collé à 10 degrés depuis février); nous profitons de notre nouveau téléviseur ACL pour regarder les centaines de postes auxquels nous avons maintenant accès. Que voulez-vous? Nous n’avons jamais eu de télé à écran plat ni de réception satellite : c’est fête au village!

Mais avant la télé, il y a le souper. Quel bonheur de faire ses courses dans des supermarchés bien stockés! D’avoir d’autres choix que porc ou poulet! D’autres légumes que patates-carottes-chou! Depuis que j’ai découvert le grand Sainsbury’s, je fais la distance supplémentaire juste pour me balader aux rayons de spécialités indiennes, de vins du monde et de confitures exotiques.

Depuis une dizaine d’années, les Anglais se sont métamorphosés en foodies (maniaques de bouffe). Bien manger est devenu une passion nationale. À la télé, tous les soirs, les émissions culinaires rivalisent avec les drames policiers et la téléréalité immobilière aux heures de grande écoute. Les téléchefs sont des stars, et leurs livres de recettes trônent aux sommets des palmarès. Oh, ils aiment encore leur cuisine traditionnelle innommable. Et quand personne ne regarde, ils s’envoient avec un plaisir coupable autant de steak and kidney pies, de yorkshire pudding et de toad-in-the-hole qu’ils peuvent. Mais ils sont éduqués maintenant : ils savent que ces horreurs-là sont mortelles, et ils ont même pris goût aux aliments sains et exotiques. Les étiquettes de leurs aliments parlent même de développement durable et de bilan carbone.

On mange bien chez Marc-et-Normand, vous le savez. Même en Hongrie, nous n’hésitions pas à traverser Budapest pour dévaliser Culinaris, la meilleure épicerie fine en ville. Je crois que nous pouvons dire sans prétention que nous sommes de bons cuisiniers. Merci à nos mères, qui nous ont enseigné ce qu’elles savaient et leur goût de bien manger; ça a aussi son utilité, de grandir dans les jupes. Une bonne partie de notre éducation culinaire, cependant, nous l’avons faite depuis que nous vivons ensemble. En suivant des cours, en achetant des livres, en essayant des recettes. Cette semaine, nous en avons conclu que les Québécois aussi ont fait beaucoup de chemin à ce chapitre. Qu’on mange bien chez nous, et que les cuisiniers de Montréal, pour peu qu’ils soient motivés, sont tout aussi capables que leurs collègues européens ou asiatiques. Fini, les complexes!

Ce n’est pas un secret, nous prenons beaucoup de plaisir à recevoir des gens à manger. Pour cela, bien sûr, il faut connaître du monde. Nous y sommes arrivés en Hongrie et nous y arriverons bien en Angleterre. Entre-temps, cependant, nous ne cuisinons que pour nous-mêmes. Moi, ça me manque, d’avoir des gens autour de ma table. De refaire le monde autour d’un bon repas. De se faire des confidences éméchées. De trinquer au cuisinier et à l’amitié. Car, manger c’est bon, mais manger en bonne compagnie, c’est tellement mieux.